Tout sur ce Français que 'personne' ne connaît (II)

Publié le par Françoise

T.M. : Vous avez cité votre premier entraîneur, Céline Duvérée. D'autres entraîneurs ont-ils particulièrement compté dans votre parcours ?

G.S. : Tous les entraîneurs que j'ai eus ont été importants, Ce n'est pas facile d'en donner un plus que les autres, parce que l'on peut difficilement mesurer l'importance qu'ils ont eue. C'est sûr que Céline a certainement façonné en grande partie le jeu que j'ai aujourd'hui, car elle m'a entraîné pendant six ans à un âge où l'on travaille beaucoup la technique. J'ai eu la chance, dans mon parcours fédéral, de me sentir bien avec tous les entraîneurs que j'ai eu. Il y a eu Dominique Poey qui a été très important au Pôle France de Poitiers. Même si je n'y suis resté qu'un an, ça a été le premier à m'avoir fait confiance, à trouver que j'avais du potentiel. Il s'est battu pour me faire rentrer à l'INSEP alors que je n'avais pas forcément le niveau. Pareil pour Luigi Borfiga, ensuite. J'étais loin des meilleurs de ma catégorie, lui aussi a insisté pour qu'on me garde au sein des structures fédérales. Puis, à Roland Garros, avec Alois Beust, c'est là où j'ai le plus progressé. J'avais 19 ans, j'ai gagné en un an à peu près 1 000 places au classement ATP (2). Malheureusement, cela s'est arrêté parce qu'il est parti ensuite entraîner à l'INSEP. J'ai enchaîné pendant deux ans avec Jérôme Potier qui m'a emmené dans les 50. Et maintenant, avec Thierry Tulasne, cela continue de se passer super bien.

T.M. : Il s'est passé quelque chose d'étonnant avec Thierry puisqu'une semaine après avoir commencé votre collaboration, début 2007 (3), vous avez « claqué » votre premier tournoi. Avec le recul, c'était une coïncidence ou un déclic ?

G.S. : C'était une période où je jouais bien mais où je manquais énormément de confiance. Je sortais d'une période où je n'avais pas gagné beaucoup de matches. Il fallait changer quelque chose. Donc, quelque part, c'est à la fois grâce à Thierry et grâce à Jérôme Potier et Rodolphe Gilbert, mes deux entraîneurs précédents. Ce n'est pas Thierry qui, en une semaine, m'a appris à faire des coups que je ne savais pas faire. Par contre, il a su me mettre en confiance. Le reste, c'est la petite magie du changement!

T.M. Quelle relation avez-vous ensemble ?

G.S. Je ne suis pas un joueur très « chiant ». Je n'ai pas besoin de discuter des heures, je ne remets pas tout en question après chaque défaite. Lui arrive justement à sentir quand j'ai envie de parler ou quand j'ai besoin d'être seul. En ce sens, on a un très bon feeling. Il a une vraie capacité à me mettre en confiance, c'est d'ailleurs pour ça que j'avais demandé de venir m'entraîner avec lui ou plutôt de revenir, puisqu'il s'était déjà occupé un peu de moi aux côtés de Jérôme Potier. Il a un discours très positif et je sentais que cela pouvait me faire du bien. C'est ce qui m'avait paru important au moment où j'avais décidé de me séparer de Jérôme, qui m'avait énormément apporté sur le plan du jeu mais avec lequel c'était plus dur dans le relationnel. Du coup, j'avais l'impression de jouer très bien mais de ne pas toujours arriver en tournoi dans les bonnes conditions.

T.M. : Vous avez la réputation d'un joueur qui n'a pas toujours été très porté sur le travail. Est-ce vrai et si oui, cela a-t-il changé ?

G.S. : C'était vrai, mais je ne faisais pas « rien » non plus ! J'étais beaucoup plus passionné par les matches que par les entraînements donc je jouais beaucoup de matches, avec une intensité autre que celle d'un entraînement. Ce qui m'intéressait, c'était de jouer des points. Faire des gammes avec des plots de chaque côté du court pendant une demi-heure, ça n'était pas possible. J'étais un « matcheur » et on a souvent dit de moi : c'est un bagarreur, dommage qu'il n'en fasse pas plus à l'entraînement. Mais je progressais beaucoup plus grâce à mes matches. Ça m'a fait du tort pendant des années, à cette même période entre 16 et 18 ans où je rentrais en sport-études et où il fallait s'entraîner quatre heures par jour. C'était dur mais aujourd'hui c'est terminé. Personne ne dira que je suis un touriste à l'entraînement. Comme on dit, c'est la première impression qui compte, et cette étiquette qu'on m'a collée, j'ai eu du mal à la faire partir. Mais aujourd'hui, je m'entraîne autant en termes de quantité et d'intensité que n'importe quel autre joueur, c'est sûr et certain.

T.M. : De la même manière, on dit que vous ne travaillez pas beaucoup physiquement et que même vous ne faites rien du tout en période de tournoi ?

G.S. : C'est vrai que je n'aime pas toucher au physique pendant les tournois. Cela n'enlève rien à ma capacité à m'entraîner et à la somme de travail que j'ai fournie jusque-là. Des footings, je pense en avoir fait bien plus que la plupart des joueurs. Je cours depuis que je suis tout petit, j'ai même fait des cross et je pense être assez dur à prendre en course à pied. Si je suis aussi résistant sur le terrain, c'est aussi grâce à ça. Quand j'étais en sports-études, on mettait un gros accent sur le foncier avec, à l'époque, Nicolas Perrotte (4). J'ai donc fourni énormément de travail. Mais c'est vrai qu'en tournoi, je n'aime pas ça ! J'ai l'impression que cela nuit à mon tennis. C'est un choix, peut-être que j'ai raison, peut-être que j'ai tort, mais aujourd'hui, je commence à bien me connaître et je crois que ce qui me convient, c'est de relâcher en tournoi et travailler un maximum en dehors, notamment en hiver.

TM.: Sur le plan musculaire, on a l'impression que vous pourriez vous développer (5)...

G.S. : De la musculation j'en ai fait beaucoup en haut, très peu en bas parce que j'ai eu des problèmes de genou durant ma croissance c'est-à-dire au moment ou il fallait la faire, quand j'étais à l'INSEP. Je suis donc assez solide et puissant du haut malgré mon apparence. Par contre, en bas, c'est vrai, j'ai des lacunes et on les retrouve dans le jeu. Aujourd'hui, j'essaye de rattraper mon retard.

T.M. : Globalement, si l'on prend en compte tous les paramètres, estimez-vous être un joueur fort physiquement ?

G.S. : Je pense être assez solide, J'ai l'impression de perdre très rarement parce que je suis fatigué. Au contraire, je pense en gagner beaucoup plus que je n'en perds !

T.M. : Autre commentaire qui revient sur vous, c'est celui sur votre jeu que l'on ditatypique. Etes-vous d'accord avec ça et si oui, cela vient de quoi ?

G.S. : Si tout le monde est d'accord là-dessus, ça doit être un peu vrai (sourire)... Maintenant, je pense que mon jeu était bien plus atypique au moment où on m'a découvert il y a quelques années. Aujourd'hui, je pense que je joue bien mieux au tennis ! Je m'appuie plus sur mes forces que sur les faiblesses de mes adversaires. Avant, je composais à chaque match en fonction de l'adversaire, je m'accrochais à tout ce que je pouvais sur le terrain. Là, j'essaye d'imposer mon jeu et c'est seulement si ça ne marche pas que je tente autre chose. Mais je pense être devenu assez solide pour gagner la plupart de mes matches sans avoir à « trafiquer » (sourire)...

T.M. : C'est donc dans le fait de « trafiquer », comme vous dites, qu'est venue cette réputation de joueur atypique ?

G.S. : Oui, c'est ça. Quand je décide de frapper la balle, elle peut aller très, très vite. Mais il m'arrive aussi de jouer des coups plus lentement que des joueurs de club (sourire)! Je me rappelle d'une victoire qui a beaucoup compté pour moi face à Tomas Berdych, à l'Open d'Australie, en 2006 (6). Je lui avais fait « péter les plombs » en alternant des balles à 2 à l'heure et des accélérations. Ça avait amusé tout le monde. Mais à l'époque, je jouais comme ça aussi parce que je ne pouvais pas trop faire autrement. Du fond, en cadence, je n'avais aucune chance de gagner contre Berdych. Si je le rejoue aujourd'hui, ce ne sera plus pareil. J'essaierai de gagner en jouant mon jeu.

T.M. : Autre chose qui renforce ce côté « atypique », c'est que vous donnez parfois l'impression de jouer en marchant Là encore, qu'en pensez-vous ?

G.S. : C'est marrant, parce que c'est quelque chose que l'on m'a toujours dit depuis que je suis tout petit ! Et d'un autre côté, on dit aussi de moi que je suis très dur à déborder. Les deux sont difficilement compatibles, non (sourire) ? Je ne sais pas à quoi c'est dû, mais en tout cas, ce n'est pas voulu. Autant parfois, c'est vrai que j'ai pu faire exprès de dérégler mon adversaire, autant au niveau de mon jeu de jambes, moi, j'ai l'impression d'être à fond !

Publié dans Interviews

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